Dans notre série d’articles Jeter les dés ne me suffit plus, après l’introduction Pourquoi le gameplay est important et la première partie Définir le gameplay, voici la deuxième partie…
2] PARAMÈTRES DE GAMEPLAY & JOUABILITÉ
Maintenant qu’on a établi quelques bases concernant la nature des jeux, leurs règles explicites et implicites, leur mécanique et la situation du gameplay comme « usage du jeu », on va pouvoir approfondir et préciser la notion en se penchant justement sur certains de ses paramètres caractéristiques…
GAMEPLAY NON-LINÉAIRE
Si le gameplay suppose donc la déduction des règles implicites d’un jeu à partir de ses règles explicites, ça laisse pas mal de marge de manœuvre aux petits malins…
Par exemple, les règles explicites des échecs ne couvrent que le déplacement des pièces et les conditions de victoire, tenant grossièrement en deux pages. Mais il existe des bouquins entiers pleins de règles implicites, de l’importance de calculer les coups à l’avance jusqu’à la manipulation de l’adversaire en passant par les nombreuses stratégies disponibles.
Si le jeu d’échecs est ainsi extrêmement profond, c’est à dire qu’il recèle des trésors de règles implicites, son gameplay est pourtant dit « linéaire », c’est à dire que les mécanismes sont apparents, très réduits (tout ce que vous pouvez y faire est encore de bouger vos pièces) et -surtout- présentent constamment le même type de challenge : basiquement, calculer plus loin que l’adversaire.
À l’inverse, on commence à parler de gameplay « non-linéaire« , lorsque le but du jeu peut être atteint de manières assez variées pour que les joueurs puissent y choisir les challenges qu’ils veulent ou ne veulent pas relever. Ainsi, un Livre dont Vous Êtes le Héros qui permettrait vraiment d’atteindre la fin non seulement par des parcourts distincts mais en rencontrant des épreuves vraiment différentes pourrait revendiquer un gameplay non-linéaire. C’est aussi, dans une certaine mesure, le cas des wargames qui vous permettent de composer librement votre armée pour ensuite déterminer votre stratégie face à l’adversaire, en choisissant où et comment affronter ses propres troupes à travers un champs de bataille plein de possibilités (le tout encadré par de gros bouquins plein de règles explicites).
Mais la non-linéarité est surtout l’apanage des jeux vidéos plein de mécanismes complexes (que les règles explicites ne couvrent que très partiellement) et qui vous permettent d’aborder leurs différents challenges dans l’ordre de votre choix et selon des approches très libres. Ainsi les RPG de baston « open-world » vous permettent de nettoyer les donjons à coups de massue, en préparant une séquences de sortilèges finement optimisée, en rôdant furtivement jusqu’à poignarder des ennemis choisis ou carrément en attirant les monstres vers une ville dont les gardes feront le travail à votre place.
C’est cette richesse mécanique qui donne alors sa profondeur au jeu, mais aussi sa variété : si tous ces mécanismes, explicites et implicites, sont effectivement exploités par les concepteurs, alors leurs interactions peuvent générer une grande richesse de challenges, une grande variété de gameplay.
Dans cette optique, le JdR sur table serait le parangon du gameplay non-linaire, puisqu’en théorie vous êtes absolument libre de la manière dont vous abordez les obstacles et que toutes les actions imaginables peuvent être tentées… même si, en pratique, c’est hautement discutable (et croyez-moi, on y reviendra).
GAMEPLAY ÉMERGEANT
Différemment, le gameplay dit « émergeant » repose sur l’écart entre règles explicites et mécanismes implicites, et plus particulièrement sur toutes les combinaisons de règles que vont pouvoir inventer les joueurs au fur et à mesure qu’ils comprennent les mécanismes sous-jacents du jeu. Plus la pratique d’un jeu repose en fait sur les interactions complexes entre des mécanismes plutôt clairs, plus il permet aux joueurs d’en ré-inventer l’usage : c’est justement ce phénomène créatif de la part des joueurs qui fait émerger un nouveau gameplay, dépassant de loin les règles explicites.
Par exemple, Magic : the Gathering est un jeu de cartes avec déjà plein de règles inscrites sur les cartes (vendues séparément dans des paquets scellés) mais qui permet une myriade de combinaisons, découvertes à force d’achat compulsif et/ou inventées par des générations de joueurs : si les cartes contiennent des règles explicites, les nombreuses stratégies combinatoires et les tactiques momentanées qu’elles permettent sont très largement implicites (au point de n’être pas toujours bien anticipées par les concepteurs).
De la même manière, les dernières versions de Donjons & Dragons contiennent des dizaines de pages de règles de combat (explicites) qui permettent une foultitude de combinaisons implicites. Elles produisent dès lors un jeu de combat tactique très largement émergeant, puisqu’il permet aux joueurs d’inventer mille manières de meuler du monstre, et même de développer pour leur perso des approches très spécialisées de ce combat, qui représente en fait l’essentiel du jeu.
LE CHOIX
Au fur et à mesure qu’on creuse la notion, les choix et même la créativité ludique m’apparaissent donc comme des aspects importants du gameplay. Pour être exact, j’y vois une dimension ludique supplémentaire : au-delà de jouer à un jeu, on peut jouer avec. On peut interagir non seulement dans le cadre des règles mais aussi sur ce cadre de règles : en découvrir la profondeur implicite, prendre appui sur ce cadre pour imprimer une poussée au gameplay et développer par le jeu, plus exactement par l’usage du jeu, de nouveaux aspects, de nouvelles pratiques, de nouvelles conceptions d’un jeu.
C’est alors que le Jeu complet (avec majuscule) se révèle comme étant effectivement la somme de ses règles explicites, de ses mécanismes implicites et des pratiques potentiellement très variées, parfois très développées ou franchement détournées que les joueurs ont du jeu « de base ». Même si le jeu reste définit et formalisé par les règles, l’usage du jeu dépasse parfois de très loin le cadre apparemment étroit du livret de règles.
Sans s’aventurer trop loin dans le game-design, on peut déjà dire que cette liberté d’usage accordée aux joueurs est un des critères de qualité du gameplay : ce n’est évidemment pas le seul (on a déjà parlé de la richesse/variété des possibilités d’action, de l’éventuelle profondeur conceptuelle d’un jeu, on évoquera beaucoup par la suite sa cohérence…).
Pour autant, la liberté ne s’exprime que par les choix et, dans le cadre d’un jeu, ces choix doivent justement être intégrés à la mécanique ludique sous formes d’options.
Quand on conçoit un jeu, il faut donc prévoir et même informer ces choix, c’est à dire fournir aux joueurs assez d’informations pour faire un « vrai choix » parmi les options que propose le jeu (la plupart du temps, on préfère un choix conscient et rationnel mais, spécialement dans les jeux narratifs, un choix moral ou émotionnel peut aussi bien faire l’affaire).
Sauf qu’il existe différents types et différentes qualités de choix : selon les options mais aussi suivant le contexte global du jeu ou des situations ludiques ponctuelles, on peut parfaitement être confrontés à des choix pourris ou engageants (suivant la valeur qu’on accorde aux différentes options proposées), des choix tactiques (qui influencent une opposition ponctuelle) ou stratégiques (qui ont des conséquences à plus grandes échelles), des choix cornéliens (quand toutes les options sont non seulement mauvaises mais dramatiques), des choix subtils ou drastiques, sérieux ou rigolos… Et s’ils seront toujours définis au sein du jeu par un certain panel d’options (qui ont déjà valeurs de règles explicites), le sens de ses choix dépendra en fait largement du contexte ludique, donc d’abord du cadre global et du ‘but du jeu’, des challenges ponctuels, de l’éventuel contrôle que ces choix nous donnent sur la suite, mais aussi du rapport personnel du joueur à l’ensemble du jeu.
Par exemple, dans un combat difficile, rien que prendre le risque d’attaquer ou rester sur la défensive n’a pas la même valeur ludique et ne produit pas la même impression chez un joueur selon qu’il a des wagons d’unités à sacrifier ou un seul personnage-joueur auquel il est attaché. L’enjeu n’est déjà pas le même si la défaite implique au pire de recharger une sauvegarde ou si elle signifie la mort définitive d’un protagoniste. Le risque varie aussi selon la manière dont on évalue les chances de réussite des deux options proposées.
Et notre approche de l’enjeu et du risque seront différentes suivant qu’on a le temps de peser nos décisions ou qu’on est pressé par l’urgence…
C’est ce qui fait dire à Sid Meyer (créateur de la série Civilization et grand-papy du jeu vidéo) que « le gameplay est une série de choix intéressants ». L’intérêt d’un choix va évidemment varier très largement selon le contexte de jeu, mais l’idée est qu’on s’investit dans un jeu notamment parce qu’il nous permet d’y exercer notre libre-arbitre, et qu’il pique notre curiosité en suggérant des conséquences possibles à nos décisions, qui vont à leur tour se traduire par de nouveaux choix.
C’est effectivement une grande part du gameplay des jeux conçus par Meyer : on y passe notre temps à choisir des options qui détermineront les challenges à venir et les options suivantes, redéfinissant constamment le champ des possibilités. Pour le coup, c’est vraiment une manière de jouer avec le jeu, en approfondissant constamment notre compréhension de la mécanique, en écartant certains challenges pour en faire apparaître de nouveaux et donc en faisant évoluer l’usage du jeu. Mais, face à des jeux aussi mouvants, encore faut-il qu’on comprenne ce qu’on est en train de foutre…
JOUABILITÉ ?
Les premiers critiques de jeux vidéo francophones ont, dès les années 80, accouché d’une notion assez cousine, pourtant distincte mais qu’on a longtemps confondu avec une traduction de gameplay : la jouabilité.
Si elle touche un peu aux possibilités d’action offertes par un jeu, la jouabilité est essentiellement une question d’ergonomie : avec quelle aisance ou quelle difficulté peut-on effectivement utiliser un jeu, apprendre à manier ses commandes et, donc, effectivement jouer avec. Ce qui n’était pas du tout une question anodine à l’époque où on s’usait les paluches sur des « joysticks » trop mous et des manettes anguleuses, même si l’on ne l’aborde plus aujourd’hui que lorsqu’un jeu vidéo a vraiment des commandes trop chiantes (c’est à dire déjà bien plus faciles qu’il y a 30 ans).
La jouabilité est pourtant une question qui devrait nous préoccuper en JdR, puisque notre loisir pose de sérieux problèmes d’accessibilité et d’apprentissage : non seulement parce qu’on s’échine encore à assommer les lecteurs avec des bouquins de 400 pages qui, fatalement, rebutent une large part du public potentiel, mais aussi parce qu’on a pas fini de se débattre avec les règles mal expliquées et les systèmes intrinsèquement imbitables. Car si les tables logarithmiques ont heureusement disparus des JdR modernes, quand on voit qu’un JdR « grand public » comme D&D implique de maîtriser facilement dix fois plus de règles (explicites) que la majorité des jeux vidéos, alors que les rôlistes s’émerveillent encore qu’un résumé des règles apparaisse par miracle sur leur fiche de perso, on sent bien qu’on est pas encore sortis de l’auberge…
Bien au-delà de l’accessibilité du loisir en général, le rapport aux règles de la plupart des JdR m’apparaît comme un putain de gros problème pour les rôlistes eux-mêmes : parce que si le JdR revendique constamment l’immense liberté qu’il offre à ses pratiquants, c’est oublier qu’un joueur ne peut en réalité y faire que ce qu’il sait être possible, et bien souvent seulement ce qu’il sait comment entreprendre. En clair : quelles que soient les possibilités théoriques d’un JdR, dans la pratique, on ne peut vraiment jouer, au mieux, qu’avec les bouts qu’on a compris.
Et à cet égard, nombre d’auteurs de JdR semblent encore considérer que « la MJ s’en démerdera » : apparemment, c’est à leur principale cliente, celle qui a le plus souvent payé le bouquin, de faire en plus l’effort de comprendre et d’expliquer aux autres utilisateurs -ses joueurs- tout ce que les auteurs n’ont pas eu le temps ou la motivation de clarifier. C’est tellement habituel en JdR que ça ne choque plus personne, mais comparons avec notre grand cousin le jeu de société : dans le livret de règles des Colons de Catane, on trouve déjà considérablement moins de règles que dans la majorité des JdR, ces règles s’appuient sur bien plus de supports tangibles (pions, tuiles, marqueurs…), elles sont néanmoins rédigées avec un évident souci de clarté (elles ont notamment été relues et testées en ce sens), la maquette s’échine encore à aérer le tout en nous fournissant de petits schémas quand ça devient trop abstrait… et tout ça pour un jeu dont la complexité, la subtilité et la virtualité restent très inférieures à celles du JdR.
Inversement, chez les rôlistes, des concepts autrement plus tordus, exprimés par des règles sensiblement plus compliquées, le tout soutenant une expérience ludique autrement plus exigeante sont généralement exposés avec une approximation dommageable et une mise en forme qu’on emploie même plus pour les feuilles d’impôts. La plupart du temps, y a même pas de pions pour les points de vie. Pourquoi ?!? Là encore : croyez bien qu’on y reviendra par la suite…
Outre que cette attitude est complètement délirante d’un point de vue industriel et commercial (imaginez le marché du jeu de société si on s’y prenait avec la même négligence), elle pose des questions intéressantes, du point de vue du game-design comme du gameplay…
Avant tout, ça veut dire que la jouabilité limite strictement le gameplay : elle est la mesure inférieure de « l’expérience-utilisateur » si chère au jeu vidéo, et le minimum syndical pour seulement avoir accès au jeu. Quand on conçoit un JdR, on devrait donc à un moment se préoccuper de l’accessibilité d’une part, en particulier faciliter l’acquisition et l’apprentissage du jeu par ceux qui le découvrent (tout spécialement dans un média « indirect », où une première lectrice-MJ est en charge d’expliquer le bousin aux copains), et de l’interface de jeu d’autre part : quels supports va-t-on fournir à nos utilisateurs pour qu’ils puissent jouer clairement et agréablement ?
C’est le genre de réflexions qui pourraient informer, entre autres, la conception des fiches de personnage (qui devraient être d’avantage un « tableau de bord » qu’un récapitulatif de la création de perso), la lisibilité des cartes et dés spéciaux, le design des écrans de MJ (qui regroupent généralement tout plein de règles et pas la moindre indication sur la manière de mener le jeu), les plateaux tactiques le cas échéant et les fameux résumés de règles à l’usage des joueurs : des aspects généralement si peu investis par les concepteurs que dans la plupart des JdR, lorsque vous incarnez autre chose qu’un combattant, la majorité des infos utiles de votre fiche sont reléguées au verso ou dans les pages suivantes.
Sans déconner : il a apparemment fallu attendre l’Apocalypse (en tous cas les jeux « propulsés par… ») pour que des fiches listent clairement les actions spécifiques au perso, et j’attends encore le système de jeu qui me fournira enfin une double-page « comment expliquer tout ça à vos joueurs ». Parce que rien que la transmission aux joueurs des règles implicites est déjà un vrai problème pour tous les #¤%µ& de jeux qu’on nous vend et que, encore une fois, ce que les joueurs percutent de leurs possibilités limite strictement le gameplay global.
Avec d’aussi hautes prétentions ludiques (gameplay non-linéaire, émergeant, évolutif…) sur lesquels on empile encore des exigences narratives, comment se fait-il que le JdR déploie si peu de moyens pour seulement s’expliquer ?
SYNTHÈSE PERSONNELLE
Tout ça m’amène à MA définition du gameplay, avec laquelle vous n’êtes pas obligés d’être d’accord mais sur laquelle j’ai un peu planché, et dont j’use principalement pour concevoir des systèmes (et parfois médire de ceux des autres).
Si le gameplay est l’usage du jeu, alors cet usage doit nécessairement considérer le fameux but du jeu, qui donne sens à l’ensemble et focalise les possibilités d’action. (Le « but du jeu de rôles » est néanmoins une question compliquée, à laquelle je reviendrai dans la suite.)
Dans l’absolu, ce but peut servir à catégoriser les jeux, de même que les types et le niveau de challenges qu’ils proposent : tout ça compose l’argument du jeu, ce à quoi on joue, normalement clairement énoncé dans les règles explicites du jeu, qui en définissent alors le cadre et les principes fondamentaux.
À mes yeux, le gameplay commence juste au-delà de cette base : dès la découverte d’un jeu, tout le long de son apprentissage, quand on se contente de respecter les règles écrites comme lorsqu’on explore les mécanismes implicites, à travers les sensations et les émotions que procure l’activité, au fil de tout ce qu’on invente, développe et même détourne à l’intérieur du cadre ludique, on est encore dans l’usage, dans la pratique du jeu.
Et tous les éléments de cet usage, pour peu qu’ils se produisent pendant les parties et participent cette pratique, appartiennent selon moi au gameplay. En bref, si les règles et leurs supports déterminent la matière du jeu, le gameplay n’est rien moins que l’ensemble des interactions dans le jeu, avec le jeu lui-même comme avec les autres joueurs.
Selon la richesse de la matière ludique de départ, le gameplay est donc un machin potentiellement énorme, protéiforme et même subjectif : quoique jouant ensemble, deux joueurs distincts peuvent ne pas jouer du tout de la même façon (ils en comprennent et utilisent des aspects différents, en tirent des impressions divergentes et ne s’investissent pas au même niveau), donc expérimenter respectivement des gameplays différents dans le cadre d’un même jeu.
Histoire d’analyser ce cadre et de s’y situer, on pourrait d’ailleurs mesurer l’ampleur d’un gameplay selon trois dimensions, dont les règles explicites fixeraient les bords :
● sa « largeur » indiquerait la diversité de ses mécanismes et la variété de ses challenges, permettant des alternatives de gameplays plus ou moins nombreuses,
● sa « hauteur » traduirait sa difficulté, le niveau du challenge et ses exigences techniques (adresse, rapidité, réflexion, connaissances, créativité…), le tout potentiellement adouci ou durci par la fameuse jouabilité,
● sa « profondeur » représenterait enfin la complexité et l’étendue des mécanismes implicites, donc la part de découverte, d’appropriation et même de développement laissée aux joueurs.
Certains aspects appartiendraient alors clairement à une dimension plutôt qu’une autre : les embranchements d’une histoire interactive participeraient de sa largeur quand la montée progressive du challenge influence sa hauteur totale (mais on pourrait donc parler de gameplay plus ou moins « pentu »). Inversement, d’autres éléments se situeraient à la croisée de plusieurs dimensions : la liberté d’interaction offerte aux joueurs, notamment, dépendrait d’abord de la largeur (variété des options) mais aussi de la profondeur du jeu (possibilités de découverte, de détournement).
Et bien sûr, le croisement des dimensions créerait des coordonnées, peut-être même une manière de se positionner dans le « volume ludique »… 🙂
Mais je mets tout cela au conditionnel car ce n’est qu’une représentation possible (et qui m’amuse) de la quantité de gameplay disponible dans un jeu, donc la taille de l’espace interactif qu’il crée. Et, en soi, ça ne traduit pas encore la qualité d’un gameplay : celle-ci risque d’être aussi subjective que peut l’être l’expérience ludique de différents joueurs ou les ambitions créatives des concepteurs. Mais la question qualitative va nous amener doucement vers la notion d’agentivité, qui est justement le sujet de l’article suivant…
C’est très intéressant. Ton idée de la fin me fait énormément penser à une vidéo d’extra credits:
https://www.youtube.com/watch?v=jVL4st0blGU
les concepts en jeu sont très voisins.
Le fait que la profondeur n’est pas la complexité est en effet de plus en plus largement admis en jeu vidéo. En JdR malheureusement, point encore…
Merci sebastien pour ta série d’articles, c’est passionnant et j’attends avec impatience la suite !
Sans vouloir couper le suspens , tu pourrais s’ilt eplait lâcher quelques noms de jeux de role qui proposent un gameplay aussi riche ? Ou est ce que pour toi c’est justement un sujet d’étude pour des projets à venir ?
En fait, le JdR a en théorie le gameplay le plus riche qu’un jeu aie jamais eu (j’explique plus avant dans l’article d’aujourd’hui) : toute la question est alors de savoir comment ça pourrait être vrai vrai en pratique…
Merci beaucoup pour ces articles qui, bien que long sont très bons …
Dans celui-ci, j’aimerais bien que la notion de « vrai choix » soit plus explicitée. Car au final, on ne parle que de cela avec du gameplay. C’est quoi les questions à se poser pour que la meneuse et les joueurs créent des choix identifiés et bien partagés qui permettent de « lâcher les chevaux » (générer un bout de partie plaisant).
Le choix est un élément important du gameplay, mais il n’est pas forcément l’essentiel de la notion (ça dépend de comment on entend le « choix », d’abord, et quand-bien même le gameplay contient PLEIN d’autres choses).
Néanmoins, ce qui distingue à mes yeux un « vrai » choix, c’est qu’il soit à la fois…
► vraiment libre : pas trop influencé, pas trop restreint et certainement pas illusoire,
► nettement différencié, donc que les différentes options ne soient pas grosso-merdo équivalentes, mais qu’elles impliquent des principes, des enjeux, des risques, des directions créatives… bien différentes,
► raisonnablement informé : qui s’appuie sur des infos utiles, et donc pas fait ni ‘au hasard’ ni ‘en aveugle’, mais suffisamment renseigné et compris (le « suffisamment » étant par contre assez variable dans un cadre narratif qui inclue le suspens).
Après, il a de fabuleux, de bons, de médiocres et même de mauvais « vrais choix » : un choix peut avoir plein d’autres qualités, plein de sujets, plein de mises en forme en plus d’être « véritable ».
J’ai hésité à commenter déjà la série d’articles sur le Gameplay. Me disant que le mieux serai d’attendre la fin des articles; cependant, il me semble que si l’on souhaite développer une réflexion la base même de celle-ci doit être la plus solide possible et les axiomes pertinents. En fait, le Gameplay est une notion qui m’intéresse beaucoup, et je trouve parfois que le débat est nécessaire : si mes idées vont à l’encontre de ce que dit Monsieur Delfino, c’est pas par esprit de contradiction, ni pour une quelconque branlette intellectuelle d’ailleurs, mais simplement pour que l’on puisse avancer sur ce qu’est le Gameplay en Jdr.
Suite à ces précautions, ces précisions quant à mes intentions, je suppose que je peux me lancer sans être taxé de troll.
En effet, me voilà embêté, car si je trouve intéressant de lire un article sur le sujet, je ne suis pas en accord avec ce que j’y ai trouvé (merci en tout cas pour ces articles, et de s’y être collé !).
Je commencerai par donner mes désaccords, pour ensuite développer ce qui m’apparaît être le Gameplay d’une manière générale, et de ce fait en Jdr…
Tout d’abord, en ce qui concerne le but d’un jeu, sa difficulté et son genre, je pense que le mieux serai d’en parlé après avoir défini le Gameplay lui-même, comme ils sont, pour ma part, un corollaire du Gameplay, plutôt que ses prémisses… j’en parlerai peut-être par la suite dans un autre commentaire (encore qu’il s’agit de notions différentes, aussi sujet à débat).
Dire que le Gameplay n’est pas ce qui est écrit dans un manuel, une notice, un livre de règle me paraît être très juste, bien qu’également se déduit de la notion intrinsèque du Gameplay.
En ce qui concerne le Gameplay linéaire et non linéaire (encore une fois, parler de telles notions avant même de définir ce qu’est le Gameplay ne me semble pas trop logique), je trouve que l’exemple du livre dont vous êtes le héros en opposition du jeu d’échecs pas vraiment probant. Le Gameplay d’un ldvelh est parfaitement cadré puisqu’il faut choisir entres des choix prédéfinis, tout comme le jeu d’échecs, et si pour certains ldvelh il existe plusieurs finalités différentes (ce qui n’est pas le cas de tous), on peut remarquer qu’aux échecs il y a les fins possibles : – les blancs gagnent, les noirs et pat.
Quant je suis enfin arrivé au Gameplay émergeant, j’ai eu la sensation alors que Monsieur Delfino définissait une notion, mais une notion qui l’embêtait quelque peu par rapport à sa conception du Gameplay (comment expliquer du Gameplay émergeant quand on pense que le Gameplay est une chose « parfaitement construite » par un ou des auteur(s)).
« Le gameplay est une série de choix intéressants », citation de Sid Meyer rejoint ce que disent la plupart des créateurs de jeu. Notamment, un exemple parmi tant d’autres, Donald X. Vaccarino, concepteur de Dominion, sur son blog décrit la genèse du jeu, et explique qu’il souhaitait qu’à chaque tour le joueur doit faire face à un choix non-évident, un dilemme en quelque sorte.
Pour finir, Monsieur Delfino quand il parle de jouabilité confond, à mon sens, beaucoup de choses, et on ne peut pas transposer tel quel ce qui se passe dans les jeux vidéos aux Jdr. Une feuille de personnage avec l’ensemble des règles n’est pas nécessairement un Jdr disposant d’une meilleure jouabilité, car les joueurs auront tendance à se plonger sur leur feuille de personnage plutôt que de se concentrer sur le cœur du jeu, à moins évidemment que le cœur du Jdr qui est joué soit le système lui-même. Les tables logarithmiques étaient l’apanage des années 80 et un peu des années 90, les jeux de plateaux et les jeux vidéo (sans compter les wargames d’alors) étaient alors très différents d’aujourd’hui, aussi abscons. Mais, il s’agissait d’une autre époque, maintenant on ne peut pas dire que le Jdr n’est pas évolué. Très subjectivement, je trouve même qu’aujourd’hui les jeux vidéo très décevants dans leur Gameplay, l’évolution étant pauvre finalement, alors qu’en Jdr la pensée, les idées de Gameplay ici et là m’excitent énormément. Il est vrai qu’on trouve plus de conférence de Gameplay en jeux vidéo qu’en jeux de rôle mais, oui, c’est vrai, qu’économiquement le marché est tellement démesuré qu’il attire plus facilement les « chercheurs ». D’un autre côté, nous avons en Jdr des gens comme Robin D. Laws, John Wick, Luke Crane, Fred Hicks and Rob Donoghue, Vincent Baker, etc. (et tous les penseurs de la Forge), la liste est longue. Je trouvais également très intéressant les développements en Gameplay de Steve Jackson (UK) dans les Ldvelh, à la fin des années 90 il faisait des conférences sur le sujet, et notamment il y a toute une idée sur le labyrinthe (sa philosophie, son intérêt, ses variations…).
Lorsque Monsieur Delfino donne sa définition du Jeu de Rôle, d’un côté l’ensemble de ce qu’il a énuméré précédemment n’est pas utilisé, et d’un autre côté je sens que cette définition sert à sa conception du Jdr, et ne se veut pas objective.
Je pense que le message est long, j’en viens à ce qui est une définition du Gameplay. Elle est basée sur différentes connaissances acquises un peu de partout, et notamment s’inspire de l’exposé sur la grammaire du jeu http://www.tartofrez.com/wp-content/uploads/2015/12/Koster_Grammaire-Ludique.pdf
Lien qu’on trouve sur le site Tartofrez de Brand.
Donc, ne peut-on pas plutôt dire que :
Le Gameplay est comment d’un outil on interagit sur les éléments d’un jeu, comment ces éléments réagissent et comment cet ensemble forme une cohérence.
Cette définition me paraît plus correcte, car elle valide, à mon avis, les constats que j’ai pu déduire des diverses réflexions sur le sujet. Elle reste cependant une proposition, évidemment.
L’avantage de celle-ci c’est qu’elle différencie bien le Gameplay du jeu vidéo et du jdr. Les deux me semblant aussi proches l’une de l’autre que peut l’être un jeu de rôle informatique d’un jeu de rôle papier. Car tout simplement l’outil n’est pas le même, d’un côté le pad ou le clavier-souris et de l’autre l’humain.
Ensuite, elle permet d’expliquer que dans un Gameplay on peut se retrouver sans objectif défini. En effet « comment cet ensemble (ce va-et-vient entre l’outil qui interagit et les éléments du jeu qui réagissent) forme une cohérence » peut se traduire par un but à atteindre, mais peut aussi se décliner autrement (comme le prouve par exemple les gameplay émergeants).
Je pourrai aller encore plus loin suite à cette définition, qui me semble justement à ce titre particulièrement intéressante, mais je vois bien que mon message est excessivement long, et, de plus, je fatigue…
Tu as complètement le droit d’être en désaccord mais, je suis désolé, un pavé pareil, sans même un saut de ligne de temps en temps, c’est très dur à lire (réponse plus tard, donc).
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Merci, et désolé pour le pavé et le manque de clarté du tout (effectivement, la prochaine fois je serai plus attentif aux sauts de ligne notamment).
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